Berengere Books: « C’est un peu par hasard de la vie que je me suis retrouvée en Afrique »
La rencontre avec Berengere Books de ce 06 decembre 2023 a Tunis dans le cadre de la 24e edition des Journées Théâtrales de Carthage nous a permis de percevoir sa vision pour le théâtre en Afrique en générale et l’Afrique noir en particulier. Revenant sur le rôle du théâtre notamment de la pièce MONDIAL.E.S dans les mouvements féministes au Sénégal et dans le monde, la metteure en scène française et directrice artistique de la compagnie Brrr Production a accepté de répondre à nos questions au cours d’un entretien que voici.
Bonjour Berengere et merci d’avoir accepté de nous recevoir dans le cadre de cet entretien. Vous êtes metteure en scène français, formée au Royaume Uni. Vous vivez au Sénégal depuis plus de 10 ans. Alors pourquoi avoir choisi de s’installer en Afrique.
Bonjour Olivier, Bonjour Jeanne. Merci pour le micro tendu. En effet, je m’appelle Berengere Books, je suis metteur en scène et également directrice artistique de la compagnie Brrr Production, une compagnie basée à Dakar au Sénégal.
Voilà, c’est un peu par hasard de la vie que je me suis retrouvée en Afrique où je suis tout d’abord pour des des raisons familiales. J’ai travaillé pendant plusieurs années en Afrique de L’Est notamment en Tanzanie. Mais c’est au Sénégal que j’ai pu développer ma propre compagnie, suite à des rencontres professionnelles intéressantes. C’est un pays qui m’a accueilli et où j’ai du plaisir à vivre et à travailler.
Vous êtes présente aux Journées Théâtrales de Carthage avec la piece MONDIAL.E.S une piece dédiée à la femme. Alors pourquoi un sujet aussi sensible.
Bah, je ne sais pas si la femme est un sujet sensible (rire 🤣) en tout cas, la pièce parle de feminisme et de la place de la femme au Sénégal et dans le monde. Elle s’appelle “Mondial.e.s” parce qu’en travaillant sur ce thème, en faisant des recherches, on se rend compte que c’est un sujet lié aux droits des femmes, pas seulement au Sénégal ni en Afrique, mais partout dans le monde. Même si les problèmes sont différents, ils se retrouvent quand même. Il y a des choses communes au Sénégal et ailleurs.
Combien de temps la création de cette pièce a-t-elle pris?
C’est un peu difficile de dire combien de temps, de la partie recherche, écriture, on dirait peut-être quatre mois. Je travaille comme ça de mon côté et ensuite, les répétitions durent encore quatre mois. Et avec les comédiens sur le plateau, la pièce est déjà écrite. C’est vrai que je retouche souvent sur le plateau pendant le travail avec les comédiens. Donc en gros on pourra dire neuf mois environ.
Le travail avec les acteurs, est – ce que c’était okay toute suite ou la collaboration a été difficile?
Moi, c’est vrai que ce sont des acteurs que je connais depuis longtemps. Quand je travaille avec eux, au départ ils n’ont pas de texte et ne savent pas de quoi ça parle. C’est une affaire de confiance, je les embarque dans mon projet, je ne leurs dit pas de quoi on va traiter. Et durant tout le premier mois de répétition, ils n’ont pas de texte. On travaille beaucoup sur le mouvement, sur le corps, moi je sais ce que je veux, je sais où je vais, par contre eux, ils ne savent pas vraiment.
Petit à petit donc le texte arrive, ils commencent à comprendre de quoi ça parle, on en parle, pendant les répétitions, ils s’approprient les personnages. Il n’y a pas vraiment de difficultés car, ils sont habitués à cette méthode de travail et ça marche bien entre nous.
Est – ce que vous pensez qu’aux sorties de ce spectacle, un spectateur non averti sur les questions, dans un pays notamment comme la Tunisie qui, ne connait pas forcement les réalités sénégalaises peut s’approprier ce sujet et comprendre le message que vous souhaitez transmettre ?
Je pense bien. L’idée de la pièce, comme je l’ai dit plus haut, c’est parlé du Sénégal. C’est une tentative de féminisme au Sénégal, mais on parle en regardant ce qui se passe à l’extérieur. Et ça m’interesse beaucoup parce qu’avec la mondialisation, on est tous sur les réseaux, sur internet, on ne peut pas se limiter au Sénégal, En tant que femme, on voit ce qui se passe et comment le feminisme est fait ailleurs. Donc je crois que, que ce soit ici à Tunis ou ailleurs oui, les gens vont pouvoir s’identifier aux problèmes de ces femmes là et faire le rapport avec leurs propres vies.
Est – ce que la femme sénégalaise s’assume t- elle d’apres vous?
Ah, ça change en tout cas. C’est vrai qu’il y a encore beaucoup de difficultés. Elles ne sont pas assez entendues, elles n’ont pas droit à la parole, mais de plus en plus, on voit les femmes dans la société qui font leurs marques. Quand elles ont des choses à dire, elles le disent à voix haute. Il y a aussi de plus en plus d’ hommes qui soutiennent la cause des femmes au Sénégal et ailleurs.
Vous avez certainement regardé quelques pièces, dans le cadre de cette édition des Journées Théâtrales de Carthage. Quelle est votre impression jusqu’ici?
Oui, j’ai pour l’instant vu de très belles choses. J’ai envie de dire des thèmes assez efficaces avec les pièces assez resserrées mais qui vont droit au but avec des mise en scène assez claires. Bon après la compétition, je ne sais pas c’est difficile à dire, parce qu’après, on a nos choix personnels et l’esthétique voilà.
Vous qui vivez en afrique et qui évoluez dans le théâtre, pensez vous que l’avenir du théâtre dans ce qu’on appelle l’Afrique noir est certain ?
Au Sénégal, c’est difficile. Le théâtre est un peu laissé à l’abandon par l’Etat en particulier, avec peu de subventions, d’autres ont très peu d’argent. Il n’y a presque pas d’acteurs ni les metteurs en scène. il y a très peu qui écrivent les théâtre.
Mais ça change aussi ailleurs. On le voit par rapport aux autres pays comme le Burkina Faso ou des pays voisins où vraiment c’est un vivier de talents, il y a des choses qui se passent.
Et là, ça revient un peu avec les compagnies qui sont en banlieues qui arrivent quand même à faire les choses. Moi, j’ai confiance, et avec des brins de jeunes qui ont envie. Mais il y a toujours ce problème de formation adéquate.
Après Tunisie, où est ce que Mondial.es va se déporter?
Nous allons nous déployer en Guinée en fin d’année, puis en Gambie en 2024 et puis on verra. Mais nous allons démarrer avec une nouvelle création.
Merci Berengere Books, bonne journée et surtout bon festival!
Olivier Charly / J.N.N. (+237) 691347589
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