« Klaxon », la sonnette d’alarme contre l’incivisme des usagers et les pseudo- assainissements de la ville
Première représentation de la création, la Compagnie Koz’art n’a pas eu tort de mobiliser un ci grand nombre d’adeptes du sixième art à la découverte de « Klaxon », la pièce de théâtre contemporaine représentative du pays triangle empreint à de grands maux.
Écrite et mise en scène par Stéphane Dipita, Klaxon, a été présentée ce vendredi 11 juin 2022 à la maison de la culture et de la danse de Bali. Alors que tous vibraient au rythme de l’apothéose de cette septième édition du festival Compto’Art 54, les habitants de la ville de Douala et environs ont eu droit à une dose de thérapie à travers cette pièce théâtrale ironique à parfaite illustration du quotidien camerounais.
Sonnette d’alarme contre les abus de pouvoir
Tout débute par une musique nettement posée sur une voix féminine et dont l’absence d’une présence physique renseignait très vite sur la vulnérabilité des usagers sans défense exposés à la pseudo- puissance de l’administrateur. Telle une vraie sonnette d’alarme, « Klaxon » est en réalité une projection sur le quotidien d’un Cameroun où l’insalubrité et tous les fléaux sautent à l’oeil nu.
Les thèmes autour de « Klaxon »
La pièce aborde plusieurs thèmes tels que les faux plans d’assainissement communaux, l’incivisme, les problèmes du manque d’ infrastructures, des coupures d’eau, de la vie chère, des églises de reveil qui rendent très bruyants nos rues et quartiers rendant ainsi impossible l’épanouissement des populations. Elle aborde également celui des inondations en faisant une brèche à Makèpè Missokè, sans oublier le problème d’abus de pouvoir de ces exécutifs communaux sans pitiés et sans scrupules qui laissent les populations dans les rues livrées à la souffrance au menu des casses anarchiques et sans fondements.
Sur le jeu des acteurs
Au total, trois acteurs se meuvent avec professionnalisme et aisance pour arracher chez le public de vifs applaudissements et susciter au sein de celui- ci des émotions plurielles. Il s’agit de Julien EBOKO dans le rôle des motomen, Tina EKAMBI dans les rôles de la call- bosseuse et Dieu et Eliane KOUMETIO dans les rôles de la commerçante et la femme accidentée. Ceux- ci se déploient sur scène et transportent une échelle, laquelle matérialise le passage clouté et les différents scripts d’un journal télévisé à la représentation camerounaise. Cette partie est alors accompagnée par des battements de pieds qui resortent le côté mythique de la pièce. Une magnifique chorégraphie de Rodriguez Tankoua.
Ces comédiens sur scène étaient très naturels dans leur jeu. Ils dégageaient une forte énergie. Leurs cris et leurs langages limpides et sans ruptures temoigent de la maîtrise des dialogues. Et très souvent, Julien EBOKO essaye de distraire en racontant une histoire de l’araignée et du petit garçon. Celle de ce garçon qui trouvant toujours les murs de sa chambre salis par la bestiole, avait décidé d’abréger la vie de celle- ci, avant de se rendre compte que cette araignée n’était autre chose que son propre papa. Julien le fait d’abord au plus haut de cette échelle et plus tard, partout ailleurs, à tort et à travers et à chaque circonstance. Pendant ce temps, les deux femmes s’attelaient à fouler le sol en interprétant minutieusement les paroles du conteur.
Quelques temps après, pendant une demie dizaine de minutes, la pièce se fait agitative et ambiante avec une représentation des marchés brouillants du 237 et leurs multiples commerces. « Je vends… je perds… », sont entre autres des cris et bruits qui s’échappaient de cette effervescence. Ce quotidien est complété par cacophonie des bruits de commerçants, taximan et benskinneurs du genre « Bonamoussadi, Bona Makepè… ». Et tout ce méli-mélo renvoie aux marchés et carrefours avec leurs phénomènes des paris sportifs, d’arnaque des garçons de rue communément appelé « Nanga boko ou Boy » et également du japap (commérage).
Le drame
A un moment, l’ambiance se voit refroidir. Une scène dramatique vient rappeler la futilité de l’existence de l’homme sur terre. Ce drame intervient au moment où survient un accident de circulation occasionnant la mort subite du motaximan et de la femme admise aux urgences quelques heures après, quelle tristesse! La vie au paradis nous est alors présentée de manière ironique. Le jour du jugement, la réincarnation, le vivre- ensemble et surtout le pardon sont sans doute les signes recherchés par le jeune metteur en scène, Stéphane Dipita.
La pitié aux mimes de la cruauté humaine
Par cet euphémisme, la pitié monte dans la salle avec une mélodie pathétiquement mimée par cette femme sans défense et sans issue qui a vu son commerce être transporté et détruit par ces agents communaux inhumains. Elle se pose des questions comment faire, pourquoi tant de cruauté ? Pourquoi tant de cruauté, la vie est très courte, c’est une véritable course au bonheur, un éternel recommencement et une réelle réincarnation. Et par ces scènes, la pièce appelle à la conscientisation, à la paix, à l’amour du prochain et à l’humanisation des institutions au Cameroun.
Klaxon, une pièce intellectuelle est un chef- d’œuvre dans laquel chacun, je dis bien chacun doit se reconnaître. Administrateurs et administrés, médiateurs, mécènes, diaspora… chacun a son rôle à jouer pour que cette pièce atteigne sa plus grande cible, qu’elle soit portée au firmament afin de participer de manière proactive à la conversion des mentalités, sa mission première.
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